Kreng Jai & Perte de face

En Thaïlande, certaines notions culturelles dépassent le simple savoir-vivre. Elles façonnent la manière dont les Thaïs communiquent et interagissent au quotidien. Parmi elles, deux valeurs essentielles : le Kreng Jai et la notion de perte de face.

Ces principes n’ont pas vraiment d’équivalent direct en Occident, ce qui les rend parfois difficiles à comprendre pour un étranger. Ils influencent la manière de parler, d’agir, et même de ressentir les relations sociales.
Là où un Européen ou un Américain privilégiera la franchise et l’expression directe, les Thaïs valorisent la retenue, l’harmonie et l’attention portée aux autres, préserver la paix sociale et le respect mutuel est souvent plus important que dire “sa vérité”.


Le Kreng Jai (เกรงใจ)

Le mot Kreng Jai se traduit difficilement. Il exprime l’idée de “retenue respectueuse” envers autrui. Avoir du Kreng Jai, c’est éviter d’imposer, de déranger ou de mettre quelqu’un dans une situation inconfortable.

Dans la vie courante :

  • Un invité refusera souvent de se resservir à table, même s’il a encore faim, pour ne pas paraître trop exigeant.
  • Un passager de bus hésitera à demander un arrêt supplémentaire pour ne pas déranger les autres.
  • Un employé acceptera une tâche tardive sans protester, car dire non pourrait être perçu comme un manque de respect.
  • Même entre amis, il est fréquent de minimiser ses besoins ou de refuser une aide pour ne pas “causer de souci”.

Le Kreng Jai est une façon de préserver l’harmonie sociale et de montrer du respect, mais il peut parfois rendre la communication indirecte ou difficile pour un étranger.


La notion de “perte de face”

La “face” (naa หน้า en thaï) est liée à la dignité et à l’image que l’on renvoie aux autres. En Thaïlande, préserver la face – la sienne comme celle d’autrui – est primordial. Humilier quelqu’un, le critiquer publiquement, ou hausser le ton est perçu comme une atteinte grave.

Quelques situations typiques :

  • Dans un magasin, un vendeur préfèrera donner une explication vague plutôt que d’admettre “je ne sais pas”, pour ne pas perdre la face.
  • Dans une discussion, contredire quelqu’un directement est évité. On opte pour une réponse plus nuancée, voire un simple sourire.
  • En cas de conflit, les Thaïs privilégient l’humour ou le silence plutôt qu’un affrontement frontal.

La perte de face peut avoir plus d’impact qu’un simple désaccord : elle peut marquer durablement une relation et briser la confiance.


Le Kreng Jai et la notion de perte de face peuvent être intimement liés. Le Kreng Jai pousse à agir avec délicatesse, afin de ne pas embarrasser ou mettre quelqu’un dans une position inconfortable. La perte de face, elle, représente justement ce qu’on cherche à éviter : être mis en défaut. Ces deux valeurs se complètent et contribuent à maintenir l’équilibre social et l’harmonie des relations dans la vie quotidienne thaïlandaise. Toutefois, elles ne vont pas toujours de pair, selon le contexte, on peut invoquer l’une sans que l’autre soit en jeu, ce qui montre leur richesse et leur importance dans différents aspects de la société thaïlandaise.


Une culture de l’harmonie

Le Kreng Jai et la préservation de la face ne sont pas des règles écrites, mais des réflexes profondément ancrés. Ils contribuent à l’image de la Thaïlande comme un pays où l’on privilégie la douceur et la discrétion dans les relations humaines. Pour un étranger, apprendre à reconnaître ces subtilités est une clé pour mieux comprendre et respecter la culture thaïlandaise.
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